4 articles récents sur la Tunisie, l'Egypte, et la question de la dette

Publié le par Desbabas

 

Question déterminante pour les peuples arabes en révolution. La question de la dette, c'est celle du néo-colonialisme, de l'indépendance des pays, et de leur capacité à mener des politiques sociales.4 articles à lire et à diffuser d'urgence.

 


 

La Tunisie a besoin de mobiliser toutes ses ressources financières afin de combattre l'extrême pauvreté, d'indemniser les chômeurs ou d'améliorer la situation matérielle des salariés.

L'aide d'urgence de la Banque Européenne d’Investissement et la Banque Africaine de Développement, ce sont de nouveaux prêts, qui alourdiraient encore la dette tunisienne.

Dans le même temps, le gouvernement Ghannouchi et le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie envisagent de consacrer 410 millions d’euros du budget de l’État au remboursement du service de la dette publique extérieure pour avril, sur un total de 577 millions d'euros pour l'année 2010 !

Le 22 février, les militants tunisiens de Raid Attac / Cadtm Tunisie ont lancé un appel :

 

Suspendre le paiement de 577 millions d’euros ne nuira en rien aux créanciers de la Tunisie.

Par contre, payer cette somme ne fera qu’aggraver la situation du peuple tunisien !

 

Leurs arguments s'appuyent sur le droit international. Juridiquement, l’état de nécessité permet aux États se trouvant dans des difficultés financières de suspendre unilatéralement le paiement de leur dette pour donner la priorité aux besoins de la population. Cette suspension s’impose, d’autant qu’une part importante de la dette publique extérieure de la Tunisie est une dette privée du dictateur Ben Ali n’ayant pas bénéficié au peuple tunisien.


Parce que la révolution tunisienne aspire à la démocratie, à la justice sociale et à la solidarité internationale, nous, citoyens français, appuyons ici leurs revendications. Les peuples en révolution doivent désormais développer librement leur pays.


La République française, l'Union européenne et toutes les instances financières concernées doivent qualifier juridiquement la dette contractée par la dictature comme odieuse et cesser d'en exiger le remboursement.


La Tunisie a besoin de mobiliser, de toute urgence, toutes ses ressources financières, afin de faire face aux nécessités de la situation actuelle, notamment : l’extrême pauvreté, l’indemnisation des chômeurs, l’amélioration de la situation matérielle des salariés, etc.


Dans le même temps, on annonce des initiatives étrangères, qui consistent à mobiliser dans l’immédiat une ‘aide’ d’urgence à la Tunisie ; plus particulièrement celles de la Commission européenne (17 millions d’euros) et de l’Etat français (350.000 euros). Sans compter les centaines de millions d’euros que comptent prêter la Banque Européenne d’Investissement et la Banque Africaine de Développement à la Tunisie.


Nous n’avons pas besoin davantage de dettes, puisque la Tunisie dispose actuellement de ressources financières nécessaires pour faire face à l’urgence sociale, comme le prouve la déclaration de Mustapha Nabli. Cet ex-haut fonctionnaire de la Banque mondiale, ex-ministre des finances de Ben Ali et actuel gouverneur de la Banque centrale de Tunisie, depuis le 15 janvier 2011, a déclaré son intention d'affecter 577 millions d’euros du budget de l'État au remboursement du service de la dette publique extérieure pour l’année 2010 !


Nous exigeons du gouvernement Ghannouchi la suspension de ce paiement eut égard à la situation exceptionnelle que traverse notre pays et au vu des besoins sociaux immenses. Cette demande se fonde notamment sur l'argument juridique de l'état de nécessité qui permet aux États se trouvant dans des difficultés financières de suspendre unilatéralement le paiement de leur dettes pour donner la priorité aux besoins de la population. Cette suspension s'impose d'autant qu'une part importante de la dette publique extérieure de la Tunisie est une dette privée du dictateur Ben Ali n’ayant pas bénéficié au peuple tunisien. Pendant la durée de suspension de paiement, un audit sur l'intégralité de la dette publique tunisienne (externe et interne) devrait être mené pour déterminer la part illégitime, celle qui n'a pas profité au peuple.


Raid Attac/Cadtm Tunisie adresse un appel urgent à tous les conseils de protection de la révolution et aux mouvements politiques, sociaux, syndicaux et de la jeunesse pour qu’ils unissent leurs efforts afin d’obtenir, dans un premier temps, la suspension immédiate du paiement de cette somme. Cela est d’autant plus urgent que le gouvernement Ghannouchi compte payer une grande partie de cette somme (410 millions d’euros) courant avril 2011.


Raid Attac/Cadtm Tunisie propose de constituer un collectif qui aura la charge de décider des actions collectives pour atteindre cet objectif.


Suspendre le paiement de 577 millions d’euros vaut mieux que de contracter de nouveaux emprunts qui aggraveront l’endettement de la Tunisie !


Suspendre le paiement de 577 millions d’euros ne nuira en rien aux créanciers de la Tunisie, par contre payer cette somme ne fera qu’aggraver la situation du peuple tunisien !


Tunis, le 22 février 2011
Raid Attac/Cadtm Tunisie
Fathi Chamkhi

 

 

 

 

 

FSM Dakar 2011

 

« La bête est décapitée mais le monstre respire ». Ce sont là les propos de M. Fathi Chamki, militant politique tunisien et membre du mouvement du front du 14 janvier. Un mouvement qui a délogé Ben Ali du pouvoir. C’était lors d’une conférence de presse organisée à la Bibliothèque universitaire (BU) de Dakar par le comité pour l’annulation de la dette du tiers monde (CADTM). Le thème choisi est : Quelles leçons des révolutions tunisiennes et égyptiennes pour le Forum social mondial ?

 

Un tunisien et un belge, respectivement M. Fathi CHAMKI et M. Eric TOUSSAINT croient en ce que les autres pays subsahariens suivent le pas de la Tunisie et de l’Egypte. La conférence de presse était co-animée par les deux, tous du comité pour l’annulation des dettes du tiers monde (CADTM). D’entrée de jeu, M. TOUSSAINT a fait un bref exposé sur le comité CADTM qui a pour cheval de bataille l’annulation des dettes publiques des pays du tiers monde. En se basant sur les récents événements en Tunisie et en Egypte, le président du CADTM martèle : « pour défendre les acquis sociaux, il faut accepter d’affronter le gouvernement. Sinon, le mouvement est voué à l’échec ». Concernant les autres parties de l’Afrique noire, il rajoute que « si les tunisiens ont pu se débarrasser du dictateur Ben Ali, pourquoi pas nous (Afrique noire) ».

 

Prenant la parole avec fierté, M. Fathi Chamki, militant politique et membre du CADTM de Tunisie, soutient que : le « 14 janvier est une véritable révolution qui peut être comparable à celle de 1989 en Allemagne par la chute du mur de Berlin ». Selon lui, le 14 janvier est le début d’un vrai combat pour l’indépendance du peuple tunisien sans ingérence. « Nous ne comptons pas nous arrêter là. Car le gouvernement fantôme mis en place est constitué de Chicago-Boys qui soutiennent que si ça continue, on aura plus de touristes, ni de salaires pour nos fonctionnaires. Ce qui prouve que la vrai révolution tunisienne est menacée ».

 

Conscient de la non maitrise de la révolution tunisienne, M. Fathi met au dam du jour les prochaines étapes de la révolution. « Nous participons au forum social mondial pour faire une campagne internationale pour l’annulation de la dette tunisienne contractée par Ben Ali afin de libérer totalement le peuple tunisien. Et à la base, nous formons des comités de défense dans les villes et quartiers pour la défense et la sauvegarde de la révolution ». Ils prévoient de mettre en place un congrès populaire à but politique pour la défense de la révolution et dans une logique de préparer des élections libres et démocratiques.

 

Interrogé sur la situation des saharaouis au Maroc, M. Fathi n’est pas allé par le dos de la cuillère. « je suis pour la libération du peuple sahraouie ». Pour l’heure, il n’est pas exclu que le « virus » de la revendication sociale en Tunisie et en Egypte se propage dans l’Afrique subsaharienne.

 

 

 

Les dettes égyptienne et tunisienne doivent être annulées pour que les peuples dans les rues du Caire et de Tunis puissent prendre le contrôle de leurs économies et faire en sorte que les pays occidentaux rendent des comptes. Dans la meilleure tradition des dictateurs, Hosni Moubarak a pillé l’économie égyptienne et est parti en ayant détourné le montant astronomique de 70 milliards de dollars pendant qu’il léguait 30 milliards de dollars de dette au peuple égyptien. Zine el Abidine Ben Ali a laissé une dette de 15 milliards au peuple tunisien alors qu’il gardait pour lui la somme plus modeste de 3 milliards de dollars. Comme d’autres régimes sont en train de vaciller, on va découvrir une multiplication d’injustices.

 

Les véritables créanciers de l’Egypte, de la Tunisie et d’ailleurs ne sont pas les Etats occidentaux qui ont utilisé les prêts pour mettre leurs hommes de main dans le monde arabe – mais les peuples de ces pays qui ont souffert de cette domination. L’Occident doit maintenant rembourser ces dettes en ouvrant ses livres de comptes aux yeux du public en retournant au peuple égyptien les avoirs de Moubarak et de ses amis qui ont été placés en Europe et aux Etats-Unis et en annulant ces dettes injustes à travers le monde arabe. Le peuple égyptien ne doit pas continuer à payer la note de la complicité occidentale au travers de larges remboursements.

 

Il est trop simple pour des dirigeants britanniques et américains d’adresser des mots chaleureux aux peuples de ces états policiers qui ont enduré corruption, torture et violations des droits humains pendant des décennies. En fait Tony Blair est celui qui a appréhendé la situation de la manière la plus honnête. Pendant que les leaders occidentaux laissaient si vite tomber Moubarak qu’on se demande comment son régime si impopulaire a tenu si longtemps, l’ancien premier ministre britannique a qualifié son allié d’autrefois comme « immensément courageux et une force du bien ».

Pour les Etats Unis et l’Europe, Moubarak était en effet un excellent client. L’Egypte a remboursé ses prêts indéniablement contractés dans les intérêts du régime plutôt que du peuple à un taux d’environ 3 milliards de dollars par an. Cet argent détourné aurait pu être utilisé pour améliorer la vie des Egyptiens ordinaires. Depuis 1981, l’Egypte a payé environ 80 milliards de dollars en remboursement du principal et des intérêts, une redistribution des Egyptiens pauvres vers les riches au niveau global.

 

Une partie de la dette du pays était indéniablement de nature militaire. L’Egypte recevait plus d’aide militaire des Etats-Unis que n’importe quel autre pays du monde à l’exclusion d’Israël – bien au-delà d’un milliard de dollars depuis que l’arrivée au pouvoir de Moubarak en 1981. Le gouvernement britannique a permis aux firmes britanniques d’approvisionner l’Egypte en matériel militaire à hauteur de 23 millions de livres en 2008 (37 millions de dollars), 16 millions de livres en 2009 (26 millions de dollars). Il n’y a pas de doute que cela a servi lorsque l’Egypte est devenue un des principaux centres du programme de kidnapping de la « guerre contre le terrorisme » menée par les Etats-Unis, des vols secrets et de la détention illégale et torture. L’Egypte doit actuellement près de 100 millions de livres (160 millions de dollars) à la Grande Bretagne. Bien que le gouvernement refuse de dire sur quoi la dette est basée, nous savons qu’elle est en rapport avec les exportations britanniques via la controversée agence de crédit à l’exportation (Export Credits Guarantee Department ) et largement basée sur des ventes qui ont eu lieu au début du régime de Moubarak. Ce département du gouvernement britannique à la transparence douteuse assure les affaires britanniques dans des parties « risquées » du monde – habituellement en supportant des industries d’armement, aérospatiales et de combustibles fossiles.

 

Le Tunisie fait face à une situation semblable – sous Zine el Abidine Ben Ali le pays a effectué des remboursements à hauteur de 40 milliards. De même, Ben Ali a servi les intérêts occidentaux en réprimant son peuple qui s’est finalement levé contre lui en janvier.

 

Lorsque les peuples ont commence à prendre le contrôle de leurs pays dans le passé – de l’Afrique du Sud de l’apartheid à la Bolivie, de l’Argentine à la Pologne – la dette a été utilisée comme un moyen clé pour imposer des politiques anti-démocratiques à ces pays. Ces politiques ont causé de grandes souffrances aux pauvres dans ces sociétés et ont bloqué toute avancée démocratique qui s’étendrait à la sphère économique. Si les révolutions en Tunisie et en Egypte déclenchent véritablement une nouvelle ère d’indépendance pour les peuples de ces pays et si comme cela parait probable, l’étincelle allumée en Afrique du Nord se répand dans le monde arabe, la prochaine étape serait de traîner en justice les responsables de décennies de domination brutale basée sur le pillage.

 

Cela implique de questionner la légitimité de la dette qui les a maintenus au pouvoir autant que d’essayer de récupérer l’argent vole par les anciens dirigeants. Il est temps pour les peuples d’Afrique du Nord de briser les chaînes de la dette qui ont contribué à écarter la liberté et le développement pour une génération.


Nick Dearden est Directeur exécutif de la Campagne dette Jubilé Royaume Uni (http://www.jubileedebtcampaign.org.uk/)

Traduction Virginie de Romanet

 


 


La dette extérieure a commencé peu après l’indépendance en 1956 |1|. Par son ampleur et ses multiples implications économiques, politiques et sociales, elle est devenue une donnée incontournable de la réalité tunisienne. Est-elle, comme elle est supposée l’être, un outil majeur de financement du ‘développement économique et social’ des pays du Sud, en l’occurrence la Tunisie ? Ou bien, au contraire, un mécanisme financier de transfert de valeur ajoutée locale vers le capital mondial ?

I. DETTE ET DEVELOPPEMENT

- 1. Le cercle vicieux de la dette


Les emprunts et les crédits publics extérieurs sont supposés pallier l’« insuffisance structurelle de l’épargne locale ». Autrement dit, l’Etat tunisien ferait appel aux emprunts extérieurs afin de financer le développement et la modernisation du pays, c’est-à-dire : l’aménagement du territoire national, l’investissement dans les secteurs économiques stratégiques, l’amélioration de l’enseignement et du système de santé publics et le financement de la recherche scientifique et de la culture, l’instauration de l’Etat de droit et l’accessibilité pour tous à la justice, le financement de la protection de l’environnement, etc.

 

L’accumulation des emprunts et des crédits, depuis la fin des années 50’, constitue ce que nous appelons la dette extérieure. Dans une première phase, qui s’étendait jusqu’à la fin des années 70’, la dette ne générait pas une charge de paiement excessive pour les pays en développement, du fait de la faiblesse des taux d’intérêts et de conditions de prêt assez ‘généreuses’ à cause de la surliquidité qui caractérisait les marchés financiers. Cette situation, plutôt favorable, était en même temps un argument de taille pour persuader les gouvernants du Sud à engager de gros investissements d’infrastructures financés par les emprunts et les crédits extérieurs.

 

La nouvelle donne de la dette, qui a émergé au cours des années 80’sous l’effet du nouvel ordre capitaliste mondial, se caractérise par un alourdissement notable de sa charge, à tel point que la plupart des Etats du Sud ont eu beaucoup de difficultés pour assurer le paiement du service de la dette. En fait, la mondialisation capitaliste néolibérale, qui a précipité la chute des modèles de développements postcoloniaux, a permis aussi de mettre à nue la vraie nature de la dette, en tant que mécanisme financier de pillage des ressources des pays du Sud. La réponse du capitalisme mondial, à cette crise de la dette, fut la soumission des pays du Sud à des Programmes d’ajustements structurels (PAS). En Tunisie, la combinaison de cette crise avec celle du régime d’accumulation postcolonial a poussé l’Etat, à son tour, à adopter le PAS en 1986. La sortie de crise que proposait le PAS supposait le maintien de la Tunisie dans le système de la dette, ce qui nécessitait la restructuration de l’économie locale et la réorganisation du budget de l’Etat en vue d’accroître ses recettes pour permettre l’affection d’une partie au paiement du service de la dette extérieure.

 

- 2. Une charge financière qui s’alourdit


L’endettement total de la Tunisie a atteint 65,5 |2| milliards de dinars (MD) |3| en 2008, ce qui représente 130% du PIB. La dette se répartie à hauteur des ⅔ en dette interne (65%) |4| et ⅓ en dette externe (35%). La dette de l’Etat représente 40,5% de l’endettement total du pays ; 23,8% de l’endettement intérieur et 78,6% de l’endettement extérieur. Cette situation reflète bien le poids de l’Etat dans l’économie tunisienne.

 

Par ailleurs, la dette extérieure totale (long, moyen et court termes) s’élève, en 2008, à plus de 27 MD |5| ; soit un taux d’endettement par rapport au PIB de 53,6%, contre 58,3% en 1986. Depuis cette date, le PIB nominal a été multiplié par 7 et l’encours de la dette par 6.4 ; le premier à crû de 7,2 MD à 50,4 MD, et le second de 4,2 MD à 27 MD. Une part importante de l’encours de la dette est le fait de l’Administration publique (67,5%) et des entreprises publiques (24,4%), tandis que la part qui revient aux entreprises privées se limite à 8,1%. L’Etat est donc le principal promoteur de la dette extérieure.

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Ensuite, l’évolution de la structure de l’encours de la dette externe selon la nature du bailleur de fonds, depuis 1995 |6|, montre un net raffermissement de la part des bailleurs privés. En effet, la part relative revenant aux marchés internationaux de capitaux a progressé de 9,6% en 1995 à 31,5% en 2008. Dans le même temps, le stock revenant à des sources publiques a reculé de 90,4% à 68,5%. A cela s’ajoute la progression assez nette des emprunts à court terme dont la part est passée de 10%, de l’encours de la dette extérieure totale, en 1995 à 21% en 2008. Cette évolution confirme la détérioration tendancielle des termes de l’endettement extérieur de la Tunisie.

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De plus, cinq bailleurs de fonds détiennent à eux seuls plus de 76% de l’encours de la dette à MLT |7| en 2008, ce sont respectivement : les marchés financiers (31,5%), l’Etat français (13,9%), la BEI |8| (11,1%), la BAD |9| (10,5%) et la BM |10| (9,1%).

 

- 3. La dette, un outil de pillage des ressources locales

De 1990 à 2008, la somme totale des emprunts à MLT reçue par la Tunisie a atteint 33,6 MD. Dans le même temps, la somme totale du service de la dette qu’elle a remboursé s’est élevée à 38,5 MD. En conséquence, le solde des entrées nettes de capitaux d’emprunts à MLT |11| fait apparaître un transfert total net négatif de 4,9 MD, presque autant que l’encours de la dette en 1990 et une fois et demi celui de 1984 |12|.

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Comme nous le constatons, la Tunisie rembourse plus qu’elle ne reçoit au titre de l’emprunt extérieur. Elle est donc exportatrice nette de capitaux d’emprunts. C’est bien elle qui finance l’extérieur et non pas le contraire. Autrement dit, les nouveaux emprunts sont réorientés vers le remboursement des emprunts antérieurs, et non pas pour financer le développement. Dès lors il apparaît clairement que les emprunts et les crédits publics extérieurs ne servent ni à développer l’économie, ni à la création d’emplois, ni à l’amélioration du niveau de vie des tunisiens, ni encore à la sauvegarde de l’environnement, etc.

 

En conséquence, en plus de la totalité des emprunts et des crédits nouveaux qui est, de fait, redirigée vers le paiement du service de la dette, une partie des recettes de l’Etat est affectée au paiement de ce même service.

II. UN PAIEMENT QUI POSE PROBLEME

- 1. Combien coûte le paiement du service de la dette

En 2008, le service de la dette extérieure a atteint 2,6 MD (¾ en capital et ¼ en intérêts). A titre de comparaison, le budget public total (gestion et équipement) de l’enseignement (base, secondaire, supérieur, recherche scientifique et formation professionnelle) s’élève à de 3,1 MD, celui de la santé à 0,74 MD. De 1990 à 2008, le service de la dette a engloutit plus de 38,5 MD. Cependant, malgré cette hémorragie, l’encours de la dette a été multiplié par 3,7 au cours de cette même période, et plus de dix sept fois depuis 1980.

 

Le ratio du service de la dette par habitant est un indicateur pertinent du « poids social » de cette charge. Ce ratio est passé de 137 dinars en 1990 à 383 dinars en 2006, avant de baisser à près de 250 dinars en 2008. Cette baisse significative de ce ratio fait suite à deux remboursements anticipés, en 2006 et 2007, de 770 millions de dinars (près du dixième de service de la dette). Ces remboursements ont été rendus possible à la suite, notamment, de la privatisation partielle de Tunisie Télécom, qui reste, à ce jour, la plus importante opération de privatisation jamais réalisée. Ceci étant dit, la charge par habitant du service de la dette pèse, en 2008, près de deux fois plus lourd qu’en 1990. Au cours de la même période, le PIB par habitant (à prix courants) a été multiplié par seulement 5,5 ; de 980 dinars à 5367 dinars. En détournant une partie du revenu intérieur, le mécanisme de la dette extérieure prive la Tunisie de ressources rares dont elle a grandement besoin pour soutenir son effort de développement, notamment, en ce qui concerne l’amélioration de son ‘capital humain’ que la politique néolibérale prétend optimiser.

 

Rapporté au montant de l’investissement public, le service de la dette nous montre dans quelle mesure ce dernier détourne les ressources financières publiques de l’investissement productif vers le capital extérieur. Le ratio |13| ainsi obtenu confirme la tendance observée ci-dessus ; ainsi la part du service de la dette par rapport au montant de cet investissement a augmenté de 2,5 en 1986 à 4,2 en 2008. En d’autres termes, le service de la dette coûte plus de 4 fois l’investissement public total.

 

Les dépenses publiques de santé |14| en pourcentage du PIB, ont baissé de 2,3%, en 1995 à 1,4% en 2008. De même que par rapport aux dépenses totales de l’Etat, les dépenses de santé ont baissé, en part relative, de 5,7% en 1995 à 5,2% en 2008.

 

Le service de la dette rapporté aux dépenses publiques totales de santé nous renseigne sur le poids qu’il représente par rapports aux sommes allouées à la santé publique. Le ratio |15|] que nous obtenons montre une progression significative du poids du service de la dette. En effet, ce ratio a augmenté de 3,753 en 1995 à 5,588 en 2008. Autrement dit, le service de la dette coûte au peuple tunisien l’équivalent de 5,6 budgets de la santé chaque année.

 

La part relative des dépenses publiques totales |16| pour l’éducation |17| par rapport au PIB, a légèrement baissé en 2008 (6,3%) par rapport à son niveau de 1995 (6,7%). Cette baisse est d’autant plus significative du processus de désengagement de l’Etat d’un secteur aussi stratégique, qu’elle s’est accompagnée d’une augmentation de la taille de la population scolarisée de 5,7%, et d’un triplement de l’effectif total des étudiants.

 

- 2. Mobilisation de nouvelles ressources pour le paiement de la dette

Le paiement du service de la dette coûte de plus en plus cher, malgré une note de frais déjà assez lourde. Pour assurer la pérennité du paiement, l’Etat n’a d’autres choix que de s’endetter davantage, comme le prouve l’augmentation du rythme moyen annuel, des emprunts et crédits nouveaux, de 1,4 MD, durant les années 90’, à 2,7 MD au cours des années 2000. Cependant, malgré cette hausse sensible du rythme de l’endettement nouveau, l’on reste en dessous du compte, comme l’atteste le creusement du déficit des transferts nets de capitaux à MLT qui a atteint plus de 4,5 MD, de 2005 à 2008.

 

La politique d’austérité budgétaire, malgré son maintien depuis plus de deux décennies et son durcissement, ne permet plus, non plus, à garantir le paiement du service de la dette. D’où la nécessité de mobilisation de nouvelles ressources de financement et de réactiver certaines autres. C’est pour faire face à une telle situation que l’Etat a décidé, à partir de 1998, d’étendre le champ d’application du système des concessions et de restructurer le système fiscal. Dit autrement, il faut emprunter davantage, comprimer les dépenses sociales et trouver de nouvelles sources de financement.

D’une part, La réorganisation du régime fiscal a permis à l’Etat, de compenser le manque à gagner du fait de l’affaiblissement des ressources rentières, pour faire face à l’augmentation du service de la dette.

 

Concernant les ressources non fiscales, celles-ci ne constituent plus que près de 12% des recettes ordinaires du budget de l’Etat en 2008, contre 29,6% en 1984. Ces ressources provenaient pour près de 60% de l’exploitation du pétrole. Il s’agit ensuite des recettes fiscales provenant des impôts indirects liés aux importations. Rapportés aux recettes fiscales totales, ces droits et redevances douanières ont baissé de 22,8% en 1995 à 12% en 2000 et 5,4% en 2008, suite au démantèlement tarifaire |18| exigé par l’Accord d’association euro-méditerranéen entre l’Union Européenne et ses Etats membres, d’une part, et la Tunisie, d’autre part.

 

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Les recettes fiscales représentent de 87% des recettes ordinaires du budget de l’Etat en 2008, contre 73% en 1984. Ces recettes fiscales accablent tout particulièrement les salaires et les revenus des classes populaires. D’abord par le biais des impôts directs qui représentent désormais plus de 37% des recettes ordinaires contre moins de 20% en 1984. Les salaires contribuent à hauteur de 35,2% à l’impôt direct, alors qu’ils reçoivent moins du ⅓ du PIB. Dans le même temps, les profits des sociétés privées contribuent à hauteur de 46% à l’impôt direct, tout en recevant plus de 50% du PIB.

Entre 1995 et 2008, alors que le PIB nominal a été multiplié que par 3, les recettes fiscales, au titre de l’impôt direct, ont été multipliées par 5,7 : leur valeur est ainsi passée de 0,8 à 4,5 MD. Cela nous éclaire sur ce processus d’effritement du pouvoir d’achat des salaires, dont la mesure où ils contribuent largement dans les recettes fiscales. En effet, l’impôt moyen sur les salaires a progressé de 8,2% en 1995, à 10,1% en 2000 et à 11,1% en 2004 |19|.

 

Les impôts indirects contribuent à hauteur de 50% dans les recettes ordinaires. Ce taux n’a pas beaucoup varié depuis la moitié des années quatre vingt. Ils sont alimentés grâce, notamment, à la TVA et aux droits de consommation |20|. Ceux-ci touchent essentiellement les classes populaires, beaucoup plus que la minorité riche. Leur poids relatif reste excessivement élevé, ce qui traduit la nature sociale injuste du régime fiscal tunisien.

 

D’autre part, les privatisations ont débuté, assez timidement, à partir de 1987, avant de prendre leur véritable envol depuis 1998. Au 1er janvier 2010, 219 entreprises publiques ont été privatisées, dans le même temps cinq concessions ont été accordées, le tout pour un montant global de près de 6 milliards de dinars |21|. 116 entreprises ont été totalement privatisées, 29 l’ont été partiellement et 41 autres ont été liquidées. Les privatisations ont touché tous les secteurs de l’économie. En termes de valeur : le secteur des services est le plus concerné avec 81,4% de l’ensemble, puis l’industrie avec 17,9% et l’agriculture et la pêche avec une part de 0,7%.

 

Les privatisations ont touché, notamment, les télécommunications (62,6% des recettes totales) surtout la cession de 35% du capital de Tunisie Télécom et de la vente de deux concessions de téléphonie. Ensuite, le secteur des matériaux de construction (14%) concerné par la cession de 4 cimenteries à des sociétés européennes, le secteur financier (banques et assurances 7,7%) et le tourisme (6%).

 

La politique de privatisation a permis, au bout de deux décennies, le rachat par le capital international de pans entiers de l’économie locale, dans les secteurs de l’industrie et des services. En effet, la part de ce capital dans le produit total des privatisations est de 87% (5,2 MD). Cette politique, aux conséquences décisives sur l’avenir de la Tunisie, a été adoptée et mise en pratique en dehors de toute consultation démocratique. Ses mécanismes et les procédures de sa mise en œuvre sont des plus opaques et échappent à tout contrôle démocratique, ouvrant la porte à des pratiques suspectes et spéculatives.

 

En plus des privatisations, l’Etat a donc mis en place une nouvelle source de financement qui porte sur l’octroi de concessions dans des activités stratégique : télécommunications, production d’électricité, transport aérien et routier. Il s’agit de la formule B.O.O, |22| qui s’ajoute au système de concessions dans le domaine des hydrocarbures qui est en pleine croissance ces dernières années. Cette nouvelle manne permet à l’Etat, à la fois, de délester son budget de l’investissement nécessaire pour tel ou tel équipement lourd, au profit d’un investisseur étranger, tout en réalisant un surplus de revenus non négligeable.

 

Le produit total des privatisations et des concessions représente 28% de l’encours de la dette extérieure totale en 2008, et seulement 14,4% de la somme totale du service de la dette payé entre 1987 et 2008. Que peut-on en déduire ? Une partie non négligeable des entreprises publiques à été privatisée pour un prix, somme toute, dérisoire, comparé à la charge de la dette que traine le pays, ce qui en dit long sur le choix de la dette extérieure comme moyen de financement du développement.

III. UNE SITUATION D’URGENCE SOCIALE

Le Sud ouest de la Tunisie, a été le théâtre, au cours des six premiers mois de 2008, du plus long mouvement de contestation populaire. Ces évènements sont la première manifestation de masse d’une crise sociale qui couve depuis quelques années. Deux questions ont, tout particulièrement, cristallisé les mécontentements : l’emploi et le pouvoir d’achat. Tandis que le premier fait référence, notamment, au revenu, le second renvoi aux prix. Ces deux phénomènes surdéterminent les conditions d’existence des masses populaires.

 

D’une manière générale et, abstraction faite des conditions héritées de la période du dirigisme bureaucratique, la situation économique et sociale actuelle est l’aboutissement logique des choix de la politique économique et sociale capitaliste néolibérale qui prévaut depuis près d’un quart de siècle. Parmi les nombreuses conséquences sociales de cette politique, il y a lieu de noter d’abord, les problèmes liés au marché du travail, à savoir : le chômage et le sous-emploi.

 

- 1. Aggravation de la crise de l’emploi

Le marché du travail tunisien se caractéristique par un taux de chômage qui compte parmi les plus élevé au monde (14,9% en 2009) et qui persiste à ce niveau élevé depuis un demi-siècle |23|. Ce niveau élevé de chômage est d’autant plus préoccupant qu’il contraste avec un taux d’emploi |24| relativement modeste ; 40% en 2008, c’est-à-dire que près de six personnes sur dix, en âge de travailler, sont économiquement inactives. Ceci donne à penser que la situation de l’emploi est bien plus grave que ne l’indique le taux de chômage. Le chômage accable tout particulièrement :

  •  
    • les femmes dont le taux de chômage dépasse 19% (12% pour les hommes),
    • les jeunes (15 et 34 ans) qui représentent près de 85% des chômeurs,
    • les régions de l’intérieur du pays. En effet, L’emploi est très inégalement réparti sur l’ensemble du territoire. Les deux régions littorales Nord est et Centre est concentrent à eux deux plus de 80% des 122 zones industrielles que compte le pays et la même proportion en ce qui concerne les emplois. Six gouvernorats sont particulièrement accablés par le chômage : Gafsa (20,1%), Gabès (21,1%), Kasserine (22,5%), Siliana (24%), Jendouba (24.1%), et Tozeur (26,1%).

En plus de la persistance d’un taux de chômage élevé, la situation de l’emploi se caractérise aussi par l’extension de la précarité qui est illustrée par l’extension phénoménale du sous-emploi, qui remplit le rôle d’un volant de sécurité du marché du travail. En effet, sachant que les principales catégories qui le constituent sont, notamment, l’emploi informel, les contrats de travail atypiques subis, le travail saisonnier subi et les chômeurs ‘déguisés’ ou bien ‘découragés’ |25|, nos différents recoupements nous ont conduits au constat suivant : en plus du chômage visible qui touche 14,2% des actifs en 2008, le sous-emploi concernerait, selon toute vraisemblance, une part relativement importante des actifs occupés, que l’on peut aisément placer au dessus de la barre de 60% !

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- 2. Extension de la précarité

Il s’agit ensuite de l’inflation dont les effets négatifs se répercutent sur les conditions de vie des masses populaires. L’envolée des cours mondiaux de la majorité des produits de base, depuis 2005, a fortement affecté le marché local dont la protection douanière a été supprimée, et qui est très dépendant vis-à-vis du marché mondial pour une grande partie de ses besoins en matières premières, en biens d’équipements, et en produits alimentaires et énergétiques. En conséquence, les prix de détail de l’ensemble des produits de base sur le marché local ont accusé une forte hausse, notamment au cours du premier semestre de 2008 : 8,7% sur les produits alimentaires, notamment l’huile avec 17,1%, le lait et dérivés 15,1% |26|, les fruits 10,7%, les légumes 8,5% et les céréales et dérivés 9,5%. La hausse des prix a touché aussi le transport pour 5,6%, l’habitation pour 4,6%, et surtout le prix de l’essence qui a augmenté de 17,4% entre septembre 2007 et août 2008. Enfin les frais de scolarité n’ont pas échappé à cette flambée générale des prix en augmentant à leur tour de 6,4%.

 

Ces hausses de prix ont touché de plein fouet des classes populaires durement éprouvées par deux décennies d’ajustement structurel. Tout particulièrement, dans le Sud ouest du pays, où les conséquences de la hausse des prix se sont combinées avec ceux de la crise de l’emploi, pour constituer l’aiguillon de la révolte populaire.

 

La crise alimentaire mondiale, a ravivé le discours sur les « charges » de compensation, que l’Etat affecte « afin de soutenir les catégories sociales les plus démunies » |27|, et leurs prétendues fâcheuses répercussions sur l’équilibre budgétaire. Ces compensations s’effectuent par le biais de la Caisse générale de compensation (CGC) qui fut créée au début des années 70’, pour subventionner les prix de certains produits de consommation courante, tels que le pain, l’huile, le lait, le sucre, mais aussi l’engrais, le papier scolaire, etc. La création de la CGC était nécessaire à la stabilité du régime qui exigeait de la part de l’Etat de garantir les conditions minimums de la reproduction de la force de travail, suite à la dégradation sensible des conditions de vie de la majorité des tunisiens au cours des années 60’.

 

Dès que la crise de la dette a commencé à pointer son nez en Tunisie, au début des années 80’, amenant dans son sillage les experts de la BM et du FMI |28|, la CGC est devenu la « charge budgétaire » dont il fallait se débarrasser. L’Etat a dû, malgré des reflexes de survie très aiguisés, suivre leurs « conseils » en tentant de supprimer la CGC en 1984. L’échec patent de cette tentative ne l’a pas empêché, par la suite, de mener une politique d’étranglement de la CGC, en réduisant le nombre des produits subventionnés, d’une part, et en procédant à des « réajustements » successifs des prix des autres produits, d’autre part. En fait, la CGC ne doit sa survie qu’à la persistance des difficultés sociales, voire leurs aggravations.

 

Les dépenses de la CGC, se situait à 4% du PIB, et à 6,2% de la consommation privée, en 1984. Ces deux ratios ont baissé successivement à 1,4% et 2,9% en 1995, puis à 0,8% et 1,3% en 2008. Cette baisse relative confirme la tendance générale au désengagement social de l’Etat. Comparée à la charge du service de la dette en 2008, la « charge » de la CGC paraît dérisoire ; 3,9 MD pour la première et 0,3 MD pour la seconde ; soit 8,2%.

En second lieu, la stagnation, voire la baisse relative, du pouvoir d’achat des salariés qui représentent, selon le recensement de 2004, 71,5% de la population active occupée. En 2008, le salaire mensuel moyen nominal s’élève à 575 dinars |29|, et le salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) à 231,3 dinars (pour le régime de 48 h par semaine) et à 200,7 dinars (régime 40 h par semaine). Le SMAG (l’équivalent agricole) est de 7,129 dinars pour une journée de travail |30|.

 

Durant les années 80’, les salaires ont perdu 15% de leur pouvoir d’achat |31|. De 1984 à 2000, le salaire moyen, en termes réels, a régressé d’un indice de base 100 à un indice 98,5 |32|. Quant au Smig, son taux horaire en 1983 était de 0,484 dinar (40h) et 0,457 dinar (48h) et le SMAG 2,640 dinars. En 2008, ces prix ont évolué en valeurs courantes comme suit : 1,158 dinar, 1,112 dinar et 7,129 dinars.

 

En prenant les prix de 1983 comme base de calcul, nous trouvons que l’indice des prix de 1983 a été multiplié par 3,03 en 2008, tandis que ceux du SMIG et du SMAG l’ont été respectivement par 2,4 et 2,7. Autrement dit, le niveau réel de ces deux derniers se situe |33|, en 2008, à environ 15% plus bas qu’en 1983 ! Dans le même temps, le PIB réel par habitant, exprimé aussi aux prix de 1983, a été multiplié par 4,9 en 2008. Cela fait apparaître une perte assez conséquente de pouvoir d’achat pour les 280 mille travailleurs (13% de l’ensemble des salariés) qui touchent le salaire minimum.

 

Conclusion

Nous avons essayé de démontrer, à travers ce texte, la nature néfaste de la dette extérieure qui capte une partie non négligeable des ressources financières de la Tunisie au profit du capital mondial, en analysant aussi certaines de ses implications économiques et sociales. Il paraît donc évident que la dette, en tant que mécanisme néocolonialiste, entrave les efforts du peuple tunisien pour son progrès économique et social et son émancipation politique. De plus, le poursuite du paiement de la dette ne peut qu’aggraver les problèmes de la société tunisienne.

 

Bibliographie :

  • Banque Centrale de Tunisie (2009), Rapport annuel. 2008. Tunis, 318 pp.
  • BEDOUI A. (2003), Dilapidation Economique Budgétaire en Tunisie (DEBT). ACTLMG
  • CHAMKHI F. (1994), Enquête sur le secteur non structuré à Slimène. Revue Tunisienne de Géographie, N°25, pp. 29-73
  • Institut National de Statistiques (2009), Annuaire statistique de la Tunisie. N° 51. 2008. Tunis, 346 pp.
  • Institut National de Statistiques (2008), Rapport annuel sur les caractéristiques des agents de la fonction publique. Année 2004. Tunis, 300 pp.
  • TOUSSAINT E. (2004), La finance contre les peuples. La bourse ou la vie. CADTM, CETIM, SYLLESPSE 638 pp.

Sites internet :

http://www.privatisation.gov.tn/
http://www.bct.gov.tn
http://www.oid-ido.org
http://www.cadtm.org
www.ins.nat.tn
www.investintunisia.tn
www.tunisianindustry.com
www.tunisie.com/APIA
www.bawaba.gov.tn _www.tunisie.com


Notes

|1| En fait, la Tunisie a déjà connu la dette extérieure au cours de son histoire. En effet, au cours de la seconde moitié du XIX° siècle, le recours malavisé à l’emprunt extérieur, et sa gestion corrompue par le sommet de l’Etat beylical, était le prétexte pour les puissances coloniales européennes afin de mettre les finances du pouvoir local sous leur tutelle, et par la suite une des cause de la colonisation de la Tunisie.

|2| Exprimée en monnaie locale, et en prenant en compte la dette extérieure à court terme : 5668 MDT

|3| En 2008, 1 dollar américain vaut environ 1,3 dinar, soit ; une dette de plus de 47,9 milliards de dollars.

|4| BCT : « Dette extérieure de la Tunisie. 2008 ». Tunis, octobre 2009

|5| soit 20,8 milliards de dollars

|6| Date de la signature de l’Accord d’Association entre l’Union Européenne et ses Etats membres, d’une part, et l’Etat tunisien, d’autre part.

|7| Dette à moyen et long terme qui est égale à la dette totale moins la dette à court terme.

|8| Banque Européenne d’Investissement

|9| Banque Africaine de Développement

|10| Groupe de la Banque Mondiale

|11| Le solde des entrées nettes de capitaux d’emprunts est le résultat des emprunts nouveaux ou bien tirages (côté entrée en +) moins le paiement du service de la dette (côté sortie en -).

|12| Faisant suite aux recommandations du FMI et de la BM, le gouvernement tunisien avait décidé de supprimer les subventions aux produits alimentaires de base à compter du 1 janvier 1984, ce qui conduisit, notamment, au doublement du prix du pain. Une révolte populaire s’en suivit (« révolte du pain »). Au bout de quelques jours de troubles graves, qui avaient causé la mort d’une cinquantaine de personnes (selon un bilan officiel), le Président Bourguiba fut contraint d’annoncer le rétablissement du prix du pain, et le maintien de la Caisse Générale de Compensation.

|13| Le SD/IP rapporte le montant annuel du service de la dette, exprimé en dinars courants, à celui de l’investissement public au cours de la même année. Il est obtenue en mesurant : Service de la dette (dinars courants) / [(investissement public (% des dépenses de l’Etat) / 100) x (dépenses de l’Etat (%du PIB) / 100) x PIB (dinar courant)]. Pour avoir plus de détails : http://www.oid-ido.org

|14| Proportion des dépenses publiques consacrées à la santé dans le PIB. Les dépenses publiques de santé représentent le total des dépenses courantes sur la santé et les dépenses d’investissement (formation brute de capital). Les dépenses courantes sur la santé peuvent être définies ainsi : services curatifs et de réhabilitation (soins hospitaliers, soins de jour, soins ambulatoires, et soins à domicile) ; services de soins cliniques de longue durée (hospitalisation, maisons de santé) ; services axillaires aux soins de santé ; produits médicaux donnés aux patients ; services de prévention et de santé publique ; administration de la santé et assurance médicale.

|15| Le SD/SA rapporte le montant annuel du service de la dette, exprimé en dinars courants, à celui de la dépense totale de santé du pays au cours de la même année. Il est obtenu en mesurant = Service de la dette (dinars courants) / [(dépenses publiques de santé (% du PIB) / 100) x PIB (dinars courants)

|16| Les trois niveaux, plus la recherche scientifique et la formation professionnelle

|17| Proportion dans le PIB des dépenses publiques consacrées à toutes les catégories d’enseignement. Ces dépenses comprennent : les dépenses d’investissement (dépenses liées à la construction, à la rénovation, aux réparations de grande ampleur et achat de matériel lourd ou de véhicules). Ainsi que, les dépenses courantes (dépenses liées aux biens et services consommés durant l’année en cours et devant être renouvelés l’année suivante)

|18| Le démantèlement total des droits de douane sur les produits manufacturiers est désormais effectif depuis le 1 janvier 2008. En ce qui concerne les services et les produits agricoles, la protection n’est pas encore totalement supprimée.

|19| Ministère du développement économique et de la coopération internationale. INS « Rapport annuel sur les caractéristiques des agents de la fonction publique. Ann

ée 2004 ». Tunis, mai 2008, p 24.

|20| Ces droits sont appliqués essentiellement sur les voitures, les carburants, le tabac et les boissons alcoolisées

|21| http://www.privatisation.gov.tn/

|22| Build, Own & Operate c’est-à-dire, un régime de concession qui prévoit la construction, l’exploitation et puis la restitution (généralement après 20 ans et plus) dans le domaine public à la fin de la période de la concession

|23| 15,2% en 1966, puis 16.4% en 1984, 16,8% en 1997 (niveau record), 15,3% en 2002 et 14.2% en. 2008

|24| Exprime le rapport du nombre des actifs occupés au nombre de la population en âge de travail (15 ans et plus)

|25| Les chômeurs découragés sont les personnes qui souhaitent travailler, sont disponibles pour le faire mais qui déclarent ne plus rechercher d’emploi parce que la perspective d’y parvenir leur paraît trop faible

|26| Le prix du litre de lait ½ écrémé a augmenté sur une période de six mois de 20%

|27| BCT. Rapport annuel 2008. Op. cit.

|28| Fonds Monétaire International

|29| BCT, « Rapport annuel. 2008 ». Tunis, juin 2007. Exprimé en euros (valeur 1,7 dinars en 2008) le salaire mensuel moyen nominal s’élève à 388 euros.

|30| Soit en euros, le SMIG respectivement 136 et 118 euros et 4,2 euros la journée de travail agricole

|31| Nations Unies, UNDP : « Stratégie de réduction de la pauvreté. Etude du phénomène de la pauvreté en Tunisie ». 1994, p 38 ;

|32| UGTT « Rapport économique et social » au Conseil National, décembre 2001, p 115

|33| Compte tenu de la prime de transport de 5 dinars par mois, instituée en juillet 1986 pour le SMIG, et dont la valeur reste inchangée depuis.

P.-S.

Fathi Chamki - CADTM Tunisie

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